«La Suisse a construit sa prospérité sur les services publics»

Interview dans le magazine du syndicat syndicom

Benoît, tu travailles à l’Union syndicale suisse depuis des années. Pourquoi viser le Conseil national ?

Les questions concrètes liées au travail sont trop absentes du débat politique. On parle de l’inflation, parfois du pouvoir d’achat. Mais pas assez du quotidien du monde du travail, de son effet sur nos vies. Par exemple la peur de ne pas retrouver d’emploi après un licenciement, particulièrement après 50 ans, des inquiétudes face à la retraite, de la galère pour élever des enfants, de la santé qui se dégrade. J’aimerais amener des réalités tangibles dans la discussion parlementaire.

Tu t’illustres dans la défense du réseau postal, et spécialement de la Poste de Saint-François à Lausanne. Pourquoi ?

Le soutien populaire à cet office est massif : plus de 3000 personnes ont signé une pétition, lancée avec syndicom, en quelques semaines !

Qu’est-ce qui est particulier dans le cas de Saint-François ?

C’est une histoire triste et symbolique. En 1999, au moment de la fin des PTT, l’Hôtel des Postes est attribué à swisscom, qui le vend en 2001 à PSP, un fonds zurichois. 20 ans plus tard, PSP trouve plus rentable d’y faire un centre commercial avec des restaurants. La Poste se fait mettre dehors de son bâtiment historique, on ne sait pas où sera l’office central de Lausanne dans 6 mois ! C’est un concentré des recettes catastrophiques appliquées au service public postal : privatisation, libéralisation, vente du patrimoine…

…on te sent en colère !

Oui ! Parce que ce sont aussi les salarié-e-s qui paient, à la fin ! On les met sous pression sans cesse. Et pourtant, engagés au quotidien, ils font en sorte que ça continue à fonctionner. Le démantèlement du service public, c’est mauvais pour les usagers et les usagères, et c’est mauvais pour les employé-e-s.

Quelle vision as-tu du service public ? 

La Suisse a construit sa prospérité sur les services publics. Une poste efficace, des transports jusque dans les vallées reculées, des réseaux de télécommunication forts. Ça permet aux gens de se sentir appartenir à la société, ça permet à l’économie de se développer. Il faut renouer avec cette logique : les prestations de base assurées hors du marché, pour tout le monde, a des coûts raisonnables. Cette recette peut s’appliquer à l’identité électronique, aux transports publics, à la Poste.